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Kerner

Le vin du poète. Comme d’autres cépages blancs à consonance germanique, le Kerner provient d’un croisement entre deux variétés de raisin. Le vignoble allemand se trouve à l’extrême nord de la zone climatique adaptée à la culture de la vigne. Cette situation a poussé les scientifiques du pays à rechercher des variétés résistantes au froid et aux maladies cryptogamiques qui ont tendance à se développer dans les endroits insuffisamment ensoleillés. Parmi les croisements ayant un potentiel intéressant, on peut citer le Freiburger, le Scheurebe, le Régent et bien évidemment le Kerner. Ce cépage découle du mariage entre du Trollinger rouge et du Riesling. Cette union fut expérimentée par August Herold de l’Institut d’enseignement et de recherches viticoles de Weinsberg en 1929. Cet hybride conjugue des qualités gustatives intéressantes avec une résistance au gel, comme aux principales maladies et a connu un développement important aussi bien en Allemagne qu’à l’étranger. 

Jusqu’en 1969, le cépage n’est pas homologué. À cette date, il reçoit le nom de Kerner en hommage à un personnage haut en couleurs de Weinsberg : Justinus Kerner. Cet homme voit le jour en 1786 dans la région du Wurtemberg. Bien que d’une famille modeste, il étudie la médecine à l’université de Tübingen. En dehors de son travail de médecin, il écrit et devient l’un des principaux poètes de l’école de Souabe avec Ludwig Uhland et Gustav Schwab. Ses poèmes, d’une tonalité toujours mélancolique, tournent en général autour de sujets naturalistes ou surnaturels. 

En 1826, il fait la connaissance d’une femme nommée Friederike Hauffe, atteinte de somnambulisme, qui aurait bénéficié d’un don de clairvoyance. Il étudie son cas et écrit un livre, La voyante de Prévost, que l’on peut considérer comme le premier ouvrage à vocation scientifique sur l’occultisme. Ce livre le fera considérer comme l’un des pères des « sciences » du paranormal. 

Toutefois, son œuvre ne se réduit pas à une fascination pour l’étrange. Il compose un grand nombre de poèmes, dont certains seront mis en musique, ainsi que des chants qui en font l’un des hommes de lettres renommés de la Souabe. Également grand amateur de vin, il meurt en 1862. Un peu plus de cent ans après sa disparition, il donnera son nom à un cépage en plein essor. 

Il a toujours été difficile de se retrouver dans la nomenclature des cépages qui ont tendance à adopter des dénominations différentes en fonction de leur lieu d’implantation. Cet art se complique encore par le fait que certains vignerons ont tendance à rebaptiser les variétés comme bon leur semble. Il en est ainsi pour le Kerner puisque le domaine Barrichet de Blonay commercialise ce cépage sous le nom St-Justin, en référence au prénom de Justinus Kerner. La sanctification du nom de ce cépage plaira peut-être aux ennemis de l’occultisme, mais n’aide pas vraiment l’amateur de ce cépage à s’y retrouver. 

Un plant venu du nord 

Le Kerner possède les qualités recherchées dans un croisement, soit une certaine résistance au froid et aux maladies, combinées à des spécificités gustatives intéressantes. Ces caractéristiques influent sur son cycle végétatif qui commence après les autres, le protégeant ainsi du gel printanier, et se termine également plus tard, permettant au raisin de continuer son processus de maturation quelques jours supplémentaires. Comme les autres cépages robustes, sa végétation a tendance à pousser de manière exubérante et force le vigneron à accomplir un travail suivi d’effeuillage.

Après son homologation en 1969, le Kerner a connu une diffusion importante et s’est largement implanté dans son pays natal. Il représente aujourd’hui environ 7% de la surface totale des vins blancs germaniques. Nul n’étant prophète en son pays, il ne bénéficie pas en Allemagne d’une très bonne réputation et reste souvent confiné à un rôle de vin d’assemblage ou de table. Malgré cela il a réussi à s’implanter dans de nombreux vignobles étrangers, allant de la Colombie-Britannique à l’est du Canada, à la côte sud de l’Australie en passant par les États-Unis et l’Afrique du Sud. Ses qualités sont surtout relevées dans les vignobles où les conditions climatiques ne permettent pas de faire pousser toutes les variétés de Vitis Vitifera. En Europe, le Kerner a également trouvé une place dans les vignobles les plus divers. Il se cultive dans les zones viticoles de la Belgique, de la Slovénie et en Suisse où il a intéressé les professionnels de divers cantons dont le Tessin ou Genève.

Dans la ville lémanique, il semble que le vignoble de l’État ait été le premier à faire des essais avec cette curiosité d’Outre-Rhin. Claude Ramu qui en a planté en 1985 nous confirme l’avoir goûté dans le domaine cantonal avant de se laisser séduire et de l’introduire chez lui. Son Kerner, répondant au nom de Saturnales, a eu, au début, un peu de peine à trouver son public, mais aujourd’hui, il s’écoule sans difficulté. En sa compagnie, une poignée d’autres producteurs a développé un intérêt pour ce cépage et le vinifie aussi bien en vin de cépage, qu’en assemblage ou en surmaturé.

Dans le reste de la Suisse Romande, il ne connaît pas un développement intense et seul le canton de Vaud, dont un demi hectare de vignoble abrite du Kerner, et le Vully fribourgeois s’y sont intéressés. Bien que ce cépage ait un potentiel indéniable, la qualité et la diversité des vins blancs romands traditionnels ne lui laissent pas vraiment le champ libre et il demeurera sans doute toujours une curiosité dans notre pays.

Où le trouver ?

En Suisse, le Kerner n’a pas de berceau traditionnel et son implantation dépend d’initiatives individuelles. Outre les cantons du Tessin et de Zürich, notre cépage a surtout conquis les vignerons genevois dont plusieurs d’entre eux tirent un excellent vin.

À quel prix ?

Pour une bouteille achetée directement chez un producteur, il faut compter entre onze et quatorze francs.

Combien de temps le conserver ?

Le Kerner donne des vins destinés à une consommation relativement rapide et ne devrait pas reposer en cave plus de 2 ou 3 ans.

Avec quel plat le déguster ?

Sa gamme aromatique en fait un compagnon apprécié à l’apéritif, mais il accompagne également avec bonheur les plats épicés. Durant les grandes chaleurs, il constitue une alternative agréable et originale au sempiternel rosé.

Quelles sont ses caractéristiques ?

Très aromatique, il offre des senteurs qui rappellent le Riesling voire parfois le Muscat. Ce cépage marie une certaine douceur avec des notes épicées et vives. Relativement long en bouche et charpenté, cette curiosité mérite qu’on s’y attarde et fait partie des curiosités intéressantes qui fleurissent un peu partout dans le canton de Genève.

Quelques producteurs proposant du Kerner :

À Genève

Claude Ramu au Domaine du Centaure - Claude-Alain Chollet au Domaine des Champs-Lingots - Jean-Jacques Gavillet à La Côte-d’Or. Sans oublier l’assemblage Kerner-Sauvignon de Jean-Pierre Pellegrin qui répond au nom de Grand-Cour blanc et a été primé aux Vinalies de Paris.

Dans le canton de Vaud

Albert Mamin au Domaine Barichet (commercialisé sous l’appellation St-Justin) - Éric et Anne Petit à Villars-sous-Yens.

Source : Alexandre Truffer, dont nous recommandons la visite du site sur l'Internet pour tout ce qu'il nous apprend de manière très intéressante. ©RomanDuVin.ch 2005