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Châteauneuf-du-Pape a de tout temps constitué une position stratégique dans la vallée du Rhône. L'histoire écrite commence en l'an 908, lorsque Louis L'Aveugle, roi de Bourgogne-Provence, donna à Remigius, évêque d'Avignon tout un territoire entre Sorgues et Rhône où Bédarrides et Châteauneuf étaient compris.
Frédéric II Barberousse confirmait la donation, mais les termes de "Château neuf" (Castrum novum) ne s'expliquent que par l'existence d'un château plus ancien, celui de l'Hers dont subsistent encore les ruines. En 1146 se dresse une tour que l'on qualifie de "vieille" en 1283 et qui avait certainement succédé à un "castrum" romain détruit probablement lors des invasions.
Le vignoble de Châteauneuf-du-Pape ne sort de l'obscurité historique qu'en l'an de grâce 1157. À cette date, Frédéric II Barberousse cède le fief impérial comprenant la localité, les vignes et les dépendances à Gufredus, évêque d'Avignon.
À la fin du XIIe siècle, les Templiers s'installent à Châteauneuf. Ils y établissent une forteresse en renforçant le château épiscopal, plantent de la vigne dans leur exploitation agricole. Éclate la guerre des Albigeois. Le roi Louis VIII et Simon-de-Montfort descendent la vallée du Rhône (1226), s'installent à Villeneuve-les-Avignon. En passant le pont Saint-Bénézet, assiègent la ville d'Avignon. La croisade des Albigeois a une importance capitale pour la suite de notre histoire. En effet, en 1229, le traité de Paris enleva le Comtat-Venaissain aux Comtes de Toulouse pour le donner à l'Église romaine. C'est ce qui amena plus tard la Papauté en Avignon et par conséquent à Châteauneuf.
Au XIIIe siècle, Châteauneuf-du-Pape est un village de 1'000 habitants, le vignoble représente alors 300 hectares. En 1307, Philippe-le-Bel ordonne l'emprisonnement des Templiers devenus trop riches, et la confiscation de leurs biens. Ceux de Châteauneuf disparaissent comme les autres. Le Pape Benoît XI étant mort en 1304, le Conclave réuni à Pérouse choisit Bertrand-de-Got comme nouveau Pape. Il revêt la tiare sous le nom de Clément V. L'Italie était alors en proie aux pires désordres. Clément V se rend dans le Comtat-Venaissin, possession de l'Eglise depuis 1229. Premier contact de Châteauneuf avec la Papauté.
L'ancien évêque d'Avignon, Jacques D'Euze est élu Pape en 1316. Devenu Jean XXII, il prend personnellement en main l'évêché d'Avignon. Châteauneuf relève directement de lui. La tour, ou château de Châteauneuf a subi les outrages de la guerre. Lorsque Jean XXII vient à Châteauneuf-du-Pape, il trouve un bâtiment pratiquement ruiné. Il en envisage la reconstruction totale et dès 1317 les premiers travaux sont entrepris. Ils sont achevés en 1333. Le domaine fut remis en valeur. On y planta vigne et oliviers. Mais le Souverain Pontife n'en profitera pour ainsi dire pas, il décède l'année suivante.
D'après les archives de la Chambre Apostolique, en 1334, le total des pieds de vigne à Châteauneuf-du-Pape est estimé à plus de 3 millions, ce qui paraît représenter 600 à 800 hectares de vigne. Dans le vignoble, on trouve déja divers cépages. Un des plus intéressants pour l'élaboration de vins rouges est le muscardin. Les cépages blancs existent également en notable proportion. Seul le nom du picardan a été retrouvé dans les écrits. En 1362, le vice-légat Espagnol Conejo introduit dans le vignoble un des 13 futurs cépages de l'appellation la counoise, un autre cépage rouge.
Après la disparition de Jean XXII, véritable novateur de la notoriété Castelpapale, se succèdent Benoît XII (1334-1342), Clément VI (1342-1352), Innocent VI (1352-1362), Urbain V (1362-1370), Grégoire XI (1370-1378), Clément VII (1378-1394) et l'antipape Benoît XIII (1394-1423) qui doit s'exiler en 1403.
Les successeurs de Jean XXII ne semblent pas s'intéresser outre mesure au château et à la propriété Papale, sauf peut-être Clément VI. Urbain V quitte Avignon pour retourner à Rome en 1367, mais revient en 1370 et va se reposer à Châteauneuf-du-Pape. Les vagues de peste et le passage des "Routiers" du Royaume qui rançonnent et pillent finissent par décourager la Cour Pontificale qui se replie sur Rome en 1411. Avec Grégoire XI, c'est le départ définitif de la Papauté. Sous le Schisme, l'anti-Pape Pierre-de-Luna vient s'installer au château (1396) y effectuant quelque restauration. Après sa fuite en Espagne, les légats ou vice-légats y séjournent de temps à autre.
Puis vinrent les guerres de religion ; Montbrun, lieutenant du Baron-des-Adrets, de sinistre mémoire, se présenta devant Châteauneuf. La localité fut pillée en même temps qu'église et château étaient incendiés. Après le passage des dévastateurs, il ne resta plus que le donjon et un grand pan de mur.
À partir de 1500, le vin de Châteauneuf a acquis une certaine notoriété comme l'attestent de nombreux actes de vente à des Orangeois ou à des Avignonnais. À cette époque, Nostradamus écrit "Châteauneuf qu'on dit communément de Pape, lieu qui produit des vins excellents dont plusieurs vaisseaux vont à Rome". Dans des archives datées de 1503 à 1640, on trouve sur la plupart des coteaux de Châteauneuf-du-Pape les cépages Vaccarèse, Terret noir et Picpoul pour les cépages noirs et Bourboulenc et Clairette pour les raisins blancs. Il est possible que ces cépages aient été déjà présents à l'époque des Papes en Avignon.
Dès 1578 des travaux de réfection sont opérés sur le Château de Châteauneuf-du-Pape. Deux ans après, Grégoire XIII accorde à J-B d'Alphonse le titre de Capitaine perpétuel et héréditaire du château. En 1623, Grégoire VIII casse cette nomination. Mais en 1643, Marius Philonardi confirme les droits pour un descendant d'Alphonse : Pierre. Aprés sa mort, C. de Suarès, provicaire général de l'Archevêché, prend possession du château. Par la suite, Hyacinthe de Libelli, Archevêque d'Avignon s'y intéresse, car il désire en faire sa maison de repos et fait entreprendre de gros travaux dès 1681. Aprés lui, les archives sont muettes. Le bâtiment fut loué à un baron Irlandais en 1728.
Malgré un déclin au XVIIe siècle, dû aux guerres, aux épidémies, au gel et à d'autres maladies endémiques,le vignoble de Châteauneuf-du-Pape va se développer considérablement dans le courant du XVIIIe siècle. En 1793, les vignerons obtiennent de vendre leur production un tiers de plus que le prix maximum départemental car le vin de Châteauneuf est reconnu d'une qualité supérieure dans toutes les saisons. À cette époque, Châteauneuf compte quatre négociants. Les tonneaux sont expédiés dans la France entière, du port de Roquemaure et parfois du port des Armeniers. D'autres encore partent en voiture par la route. Les décades passent.
Vers 1800, 668 hectares, dont 425 hectares de vignes en petites parcelles de 1'400 m2 en moyenne produisent 11'000 hectolitres en année commune. Le vin est l'objet d'un commerce important et les habitants continuent de planter de nouvelles parcelles. En 1829, prés de 2'000 hectolitres de Châteauneuf-du-Pape sont vendus hors du département.
Le cépage grenache, originaire de l'Aragon s'implante en Roussillon, puis en Languedoc et arrive à Châteauneuf-du-Pape avant la crise phylloxérique. Il prend une véritable extension au moment de la reconstitution du vignoble.
Grâce à la qualité de son vin, Châteauneuf-du-Pape restera prospère jusqu'à la crise du phylloxéra. Les méthodes de culture ne varient pratiquement pas à travers les siècles. Les premières transformations interviendront peu avant la deuxième guerre mondiale avec la mécanisation. Pour garantir la qualité des vins de Châteauneuf-du-Pape, en 1894, les vignerons créent le premier syndicat viticole qui s'engage à fournir aux acheteurs des vins récoltés sur leur territoire et les meilleurs crus garantis par l'estampille du syndicat. En 1911, le conseil municipal instaure une commission de 34 viticulteurs pour procéder à la classification des vins dits de Châteauneuf et pour sauvegarder l'authenticité de leur cru. En 1923, le syndicat des propriétaires viticulteurs de Châteauneuf-du-Pape est créé en vue d'obtenir la reconnaissance de l'Appellation d'origine Châteauneuf-du-Pape, sur les bases de la loi de 1919. Juriste et vigneron, le Baron Le-Roy-de-Boiseaumarié est sollicité par ses pairs pour cette entreprise. Les actions judiciaires du Syndicat et de son célèbre président aboutiront à fixer les règles de l'appellation Châteauneuf-du-Pape qui ont depuis largement inspiré les auteurs des statuts des appellations d'origine contrôlées.
Les vignerons de Châteauneuf-du-Pape seront les premiers à s'être imposé des conditions de production. Grâce au dynamisme et à la compétence du Baron-le-Roy, après plusieurs années de procédure, la Cour de Cassation confirme le 21 novembre 1933 la délimitation et les conditions de production de l'appellation. Malgré quelques légères modifications en 1936 et 1966, elles sont toujours en vigueur aujourd'hui pour garantir la qualité des vins de Châteauneuf-du-Pape.
Durant l'occupation allemande, la tour de Châteauneuf-du-Pape, transformée, sert de poste d'observation et de dépôt d'armes. Puis c'est le débarquement, la retraite des forces hitlériennes qui, le 20 août 1944, font sauter les réserves de munitions. La plus grande partie de l'édifice s'effondre, seule la face Est est épargnée ainsi que les salles basses.
Fort heureusement, la fureur des hommes n'a pas su réduire le "Château-neuf" et le promeneur du XXIe siècle a une vision presque identique à celle qu'avait Jean XXII lorsqu'il arrivait à la cité Papale pour aller en son lieu de repos préféré.
Références bibliographiques :
Histoire du vin en Vaucluse, Domaines vinicoles historiques. Robert Bailly - Fascicule Châteauneuf-du-Pape. Jules Avril.