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Extraction (les règles de l')

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L'extraction du raisin est similaire au sachet de thé. Tous deux contiennent des composés aromatiques et des matières colorantes à prélever d'un corps solide pour en transmettre les caractères à une boisson. S'agissant du thé, l'infusion des feuilles transmet de la couleur, de la saveur et des tannins dans de l'eau. 

Avec le raisin rouge, ce rôle identique provient des peaux qui complètent le jus dans ces mêmes éléments. Ces deux boissons nécessitent une extraction appropriée en durée et en force. Un sachet de thé insuffisamment infusé ou infusé dans une eau pas assez chauffée manquera d'intensité. À l'inverse, une trop longue infusion ou une eau trop chaude peuvent souligner une saveur âcre, amère. 

La production du vin rouge obéit au même scénario. Les composants apportant couleur, saveur et tannins se trouvent dans les peaux. L'extraction de ces molécules par diverses méthodes de macération est à la base des procédés de production des vins rouges. Souvent le terme macération est utilisé comme un synonyme d'extraction, bien que la macération est le moyen et l'extraction le résultat. 

En premier lieu, c'est le caractère de la grappe de raisin et l'objectif du vinificateur qui déterminent cette approche. En général, on recherchera d'intensifier au maximum l'intensité du fruit tout en minimalisant les effets négatifs de tannins durs, d'une acidité excessive et de saveurs peu appétissantes. 

Le moyen le plus sûr pour y parvenir consiste à utiliser une matière première bien mûre et de la meilleure qualité. Les techniques d'extraction avec une matière première d'une telle qualité influenceront le style désiré. Si le type de vin recherché est basé sur le fruit et la consommation rapide, comme le beaujolais nouveau, on évitera au maximum l'extraction des tannins. En revanche, pour produire un vin de garde devant évoluer favorablement pendant des décennies (grands Bordeaux, Barolo), à l'inverse, la macération sera très poussée. Des cépages comme le Cabernet Sauvignon, la Syrah tolèrent des techniques de macération plus agressives, alors que d'autres, comme en particulier le Pinot noir demandent une approche plus douce. Cependant, quel que soit le cépage, il y a toujours des éléments indésirables dans le vin. 

Trois premiers facteurs vont déterminer le résultat final : 

1) L'état des grappes en relation avec le liquide. Il est beaucoup plus aisé d'extraire de la couleur, des tannins et des saveurs de raisins écrasés dans leur jus que de baies entières. 

2) La température de la macération. 

3) La durée de cette macération. Ces processus de macération et d'extraction commencent dans le pressoir, immédiatement après la vendange. Deux décisions initiales doivent être prises par le vinificateur : égrappage ou non (ne conserver que les fruits ou garder la grappe entière) ; conserver les baies entières ou fouler la vendange. 

Aujourd'hui, l'égrappage du raisin rouge est le procédé le plus fréquent pour une production moderne. Les variétés comme le Cabernet Sauvignon et la Syrah ont des baies à peau épaisse, si bien que les grains ne souffrent pas trop d'un égrappage. Au contraire, le Pinot noir est fragile et les baies écrasées libèrent du jus. Il est par conséquent plus fréquent en Bourgogne et dans les côtes du Rhône nord de vinifier le raisin non égrappé ou alors partiellement égrappé. Cette dernière technique est de moins en moins courante parce que sujet à controverse. Les adeptes insistent à dire que la grappe bien mûre augmente la proportion en tanins et contribue à des apports de saveur épicée et végétale agréables. La grappe a pour effet de ralentir la fermentation qui a tendance à être rapide avec le Pinot noir, en diminuant quelque peu la température dans la cuve. D'un autre côté, les adversaires de l'absence d'égrappage craignent les tanins herbacés trop verts, comme une coloration moins intense, la grappe absorbant des pigments colorants. En fonction de l'intensité d'extraction souhaitée les vinificateurs préfèrent une proportion variable de baies entières. Donc l'égrappage comme le broyage partiel du raisin peuvent intervenir. 

Beaucoup de producteurs utilisent une technique d'extraction appelée préfermentation à froid. Il s'agit en fait de laisser les peaux macérer dans leur jus, à basse température, ce qui retarde le départ en fermentation. Ainsi, des grappes vendangées de bon matin peuvent rester plusieurs jours dans des cuves réfrigérées. C'est une méthode pour l'extraction de la couleur et des arômes solubles à l'eau, mais seulement très peu de tannins qui eux ne se libèrent que dans l'alcool. Une température de 12 à 13 ° C, avec un peu de soufre et une couverture de gaz carbonique préviennent l'oxydation. Certains vinificateurs pensent que cette préfermentation au froid ne doit pas durer plus de 4 jours. Au-delà la dose protectrice de SO2 devient trop importante et peu libérer des tannins amers. Il vaut mieux laisser la fermentation s'installer spontanément.

Lorsque les levures commencent à transformer le sucre du raisin en alcool, il y a production de gaz carbonique (CO2) qui véhicule les parties solides à la surface du liquide en formant ce que l'on appelle le chapeau. Dès que ces parties solides ne sont plus submergées dans le moût en fermentation, et en fonction de la chaleur, elles ne produisent plus l'extraction recherchée. 

C'est à ce moment précis que le vinificateur peut choisir entre deux techniques traditionnelles développées à Bordeaux et en Bourgogne : le pigeage, consistant à noyer très copieusement le chapeau en l'immergeant vers le bas ; le remontage, consistant à pomper du jus pour imbiber le chapeau. 

La fréquence de ces techniques dépend du cépage, du terroir et du millésime. Les extrêmes peuvent aller de 3 à 50 fois, avec au point culminant de la fermentation jusqu'à 4 fois par jour. Aujourd'hui, la vinification moderne permet d'obtenir un fruit plus riche et des tannins plus doux parce qu'on sait approcher les techniques d'extraction plus en douceur. 

La température influence de manière très significative aussi bien la fermentation que le taux d'extraction. La chaleur rend les peaux très délicates, jusqu'à le décomposer, ce qui rend l'extraction plus aisée. Un autre facteur, plus la température est élevée (jusqu'à une certaine limite), plus les réactions chimiques sont accélérées. 

La plupart des vinificateurs maintiennent les températures de fermentation des vins rouges de 20 à 25° C, toutefois nous avons rencontré des cas où l'on a fait monter la température d'une syrah jusqu'à 36°C, ce qui peut avoir pour conséquence de tuer les levures, mais permet en revanche de raccourcir le temps d'extraction et prévenir la sur extraction de tannins grossiers indésirables. D'autres producteurs préfèrent laisser les futurs vins de longue garde en contact avec les parties solides jusqu'à la fin de la fermentation et même au-delà. Cette technique de macération post-fermentaire est courante dans le Bordelais, mais elle a fait des adeptes dans le monde entier. L'avis général est que cette méthode libère essentiellement les tanins qui sont eux solubles dans l'alcool, alors que la technique post-fermentaire n'a que peu d'impact sur la couleur et sur les arômes, l'essentiel de ces composants ayant été extrait au début des opérations d'extraction. 

Souvent les vinificateurs décident par la dégustation, le verre en main, que c'est le moment de passer au pressurage. On ne décide pas ce moment important devant l'écran de l'ordinateur !