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vin (en langage familier et argotique)

Tout ça n'est pas du bon vin. Du pinard peut être tout simplement un mauvais pinot, puisque le suffixe "-ard" donne toujours une connotation péjorative.

Piquette, outre qu'elle pique, puisque justement ce n'est pas bon comme vin, c'est encore "petit" à cause du suffixe "-ette" (cf. clopinettes ou mominette qui est non seulement une adolescente, mais encore un verre d'apéritif). Tout comme un autre, -asse, aussi péjoratif, qui a donné vinasse (cf. poufiasse, déguelasse, connasse, etc.) ou "-oche", plus sympathique celui-là, dans vinoche (mais aussi cinoche, valoche etc.). Un vin imbuvable était (est toujours) appelé pipi de chat. On dit aussi picrate qui, selon J.L. Calvet, viendrait du piccolo, autre mot pour le vin, et c'est à partir de celui-ci que s'est formé le mot picoler, boire de l'alcool. Il semble pourtant que l'étymologie est fausse, car le mot vient du nom du sel de l'acide picrique que le vin contient. Il y a d'autres mots du vieil argot et à l'étymologie confuse, tels que tortu, tutu, jaja (le jaja retrouve sa popularité d'antan, attention, c'est du rouge, pas du blanc), jinjin (ce n'est pas gin-gin, du nom de la boisson anglaise).

Beaucoup de boissons alcoolisées ont leur nom à elles, par exemple l'eau-de-vie, c'est souvent de la gnôle, du rouge c'est du rouquin (pas très courant), du beaujolais c'est du beaujolpif. La bière est aujourd'hui commandée par les jeunes en tant qu'une binouze ou, terme plus ancien, une bibine (qui par extension, sous forme de la, bibine désigne aussi un mauvais vin, voire un mauvais café). L'anis est appelé bain sulfureux, le pastis c'est un jaune etc.

À titre d'exemples : Qu'est-ce que tu préfères, un apéro, un coup de rouge ? C'est du rouquin-maison (Céline). Écoute, c'était imbuvable ce qu'il nous a servi, du vrai pipi de chat. C'est un grand cru, c'est pas de la vinasse. J'en boirais bien un autre demi, un vrai demi de vraie bière (dit Zazie chez Queneau).

On boit beaucoup : on picole, on se bourre (la gueule) ou, rare mais énigmatique, se bourrer comme un coing, Il existe une variante "se péter la gueule; se camphrer la ruche. On biberonne (il y a l'idée de la régularité), comme un enfant qui suce son biberon, nous disons avec un sens différent, on tète (est dit de celui qui ne lâche pas de téter, c'est toujours l'enfant qu'on met en cause, il tète sa mère, il tète son biberon), on siffle, on s'en jette un (dans la trappe, dans le col, dans le plomb etc. et bien sûr, on le fait rapidement). On s'en envoie un (parfois derrière la cravate, c.-à-d. "un", sous-entendu un verre. Nos amateurs des boissons alcoolisées disent: on écluse (une écluse est appelée à faire passer de l'eau, ça peut être quelque chose de plus fort), on pompe, on se torche. Il paraît que se torcher, se bourrer la gueule s'utilise plutôt à la première personne (genre: qu'est-ce qu'on s'est bourré la gueule hier, je te dis pas), tandis que picoler, biberonner etc. plutôt à la troisième, en parlant des autres (il ne fait que picoler). Si vous avez avalé plusieurs verres de trop la veille, et que vous avez un mal de crâne, le diagnostic: vous avez pris une biture (attention, biture est liée à l'idée de l'excès d'alcool, mais à toute biture à celle de l'excès de vitesse) ou une cuite (ce dernier mot étant plus fréquent) ou encore une pinte ou une mufflée (c'est une cuite à ne pas tenir debout). Donc, logiquement on dira se cuiter ou, plus rarement, se biturer. Mais on peut encore se noircir, se poivrer ou se pinter (s'enivrer) ou pinter tout court (boire abondamment), avec toujours le danger de paraître vieux jeu ou trop provincial. Il y a aussi un charmant euphémisme: se piquer la ruche. Dans la banlieue parisienne, on boit autrement: on binouze, on fait sauter la gamelle, on se met un nez rouge, on se peint etc. Une expression qui n'a rien de familier, mais qui s'utilise beaucoup: boire comme un Polonais, c'est boire beaucoup. À l'origine, s'y ajoutait encore un sens supplémentaire : boire sans s'enivrer, qualité attribuée aux Polonais par Napoléon qui est à l'origine de cette expression.

Qu'est-ce qu'on écluse et qu'est-ce qu'on pompe ? Un godet, un canon (les plus usuels, ce dernier étant à l'origine une mesure de capacité (1/16 l, pas grand-chose au fait), un glass (qui est plus rare) On boit un coup, c'est-à-dire un verre; pomper un verre. Bien sûr, tous les verres ne sont pas pareils. Ainsi, un galopin est un petit verre de bière, une mariée aussi, un voyageur est un verre de blanc (et pierrot aussi), mais ces mots sont connus plutôt des Français qui ont l'habitude de lever le coude, donc triez vos propos en fonction de votre auditoire. Si c'est de la bière brune, alors on prend une brune, ou, si c'est trop pour vous, une demi-brune, un demi de brune (car à l'origine il contenait un demi-litre, aujourd'hui ce n'est plus qu'un quart) ou une mousse (25 cl aussi) (un demi sans faux-col, étant un demi sans mousse). Idem pour la blonde, sauf qu'un demi tout court est compris comme une blonde pression ordinaire, tandis que si vous voulez de la brune, alors il faut le préciser. Un ballon (10 cl) pour le rouge (c'est le nom d'un verre de vin le plus ordinaire). Un formidable (50 cl) = 2 demis (25 cl) = 2 galopins. Mais si vos capacités le permettent, vous pouvez descendre un litron (toute une bouteille, mais c'est du mauvais vin qu'on vend d'habitude dans les bouteilles d'un litre). Une boutanche est une bouteille de vin de 75 cl (absent du Petit Robert pour le moment). Un cadavre est une bouteille vidée, et certains "spécialistes" distinguent les bouteilles qu'on vient de vider et les bouteilles qui ont vécu jusqu'au lendemain d'une ripaille: celles-ci n'ont rien de cadavérique. Un monocle est un verre reçu à l'œil, c'est-à-dire gratis. Quand on boit avec des amis, on peut dire qu'on prend un pot. D'ailleurs ça se dit aussi pour diminuer l'importance de l'événement: tu sais, chérie, on va juste prendre un pot avec des amis, on arrose le permis de conduire, la rentrée, l'approche des vacances, mais on va boire juste une goutte... Et de se lancer dans une saoulographie magistrale. Mais vous pouvez aussi boire en suisse, s'enivrer tout seul, ou encore se remplir son verre, mais pas celui du (des) copain(s).

Exemples : j'aime bien m'en jeter un de temps en temps, mais prendre une cuite chaque jour comme il le fait, ça non, merci ; Il a éclusé le verre d'un trait ; j'en ai assez de ces saouleries, c'est tous les jours que tu arroses quelque chose, tu n'arrêtes pas de picoler. C'était bien hier chez Manu, on s'est complément pété la gueule ; on s'est bituré ; on était biture ; on était torché et en plus je me suis ramassé une nana...

Quand on écluse le verre d'un seul coup, on fait cul sec : il s'agit ici du cul du verre, de son fond, naturellement. Si vous prenez votre temps pour finir votre consommation, vous sirotez votre vin. Autre manière de boire est la Russe: si l'on trinque à la russe, on jette son verre vide derrière soi.

Traitons-le de tous les noms: c'est un alcoolo, un poivrot, un soûlard ou soûlot. C'est aussi un pochard (ou sa variante usuelle chez les jeunes pochetrons ou pochtrons), un sac à vin, un biberon, un vide-bouteille, il a un trou sous le nez etc. Parmi les derniers arrivés sur la scène: éponge, lavabo (peut-être parce qu'on dit "boire comme un évier"), tout-à-l'égout...

Exemples : Qu'est-ce que tu racontes : "on a pris un pot avec les amis", tu deviens un vrai soûlard. Mais il ne dessaoule jamais, c'est un pochtron fini. Les employés de la société X ? Tous une bande de poivrots!

L'effet est connu de tous: après deux-trois verres de vin, on a seulement un coup dans l'aile, on est parti, pompette (on l'entend dire par des personnes âgées, après le premier verre : Oh, je suis un peu pompette ; on est gai, en goguette, ou l'on a un verre dans le nez (ce qui laisse perplexe (en France on se met vraiment n'importe quoi dans le nez), on est gris, noir, mais en principe à ce stade, le vocabulaire n'est pas varié, il s'enrichit graduellement. Certains ne tiennent pas l'alcool, ils s'écroulent sous la table, après les quelques premiers verres descendus.

Puis on se bourre, on est bourré, beurré, ou beurré à mort), et l'on a sa dose, on est givré (à zéro), paf, schlass, raide (un max.), bu (qui dériverait de l'anglais drunk), rond (comme une queue de pelle, comme une barrique, comme une soucoupe, comme un coing, comme une vache, comme une cantine, comme un boudin), blindé, cuit, plein, imbibé, mûr, rétamé (c'est l'étape à peu près ultime car se rétamer veut dire aussi tomber). Quelques expressions sinon pas très courantes, du moins rigolotes : être sur Soleure (en Suisse), être asphyxié, être saoul comme 36 cochons, on voit double. Depuis peu on est à l'ouest, en défonce (ou foncedé), racave (attention, sans accent à la fin, et ça signifie aussi bien sous l'effet d'une drogue). Côté sentiments, l'euphorie monte, bien entendu, on est déjà dans les vignes du Seigneur. On a aussi le vin triste ou joyeux selon que, après avoir bu, l'on soit déprimé ou que l'on saute de joie. Attention, certains mots sont à peine familiers, d'autres le sont beaucoup plus.

Le matin, chacun le sait, on a la gueule de bois, on n'est pas bien, on a soif et la bouche est empâtée. On peut aussi avoir mal aux cheveux ou avoir un casque.

Exemples : Trois verres, ça suffit largement pour se mettre en goguette. Je ne le supporte pas quand il a un verre dans le nez. Les gars sont complètement paf. Quand il a un coup dans l'aile, qu'est-ce qu'il peut dégoiser (Gibeau). Faut dire qu'il était noir comme une vache, papa ! (Queneau).